Avant toute chose, je préparai mon message pour Victor. Plusieurs visites étaient prévues sur les deux jours à venir, toutes me tentaient. Mais pour accéder à plusieurs cours, il fallait que je sois bien organisée. Je finalisai mon choix, le transmis, pris un bain puis au lit.
Le lendemain mon réveil sonnait à 6 heures. J’étais du genre matinal, cela ne me gênait absolument pas. J’en avais parlé à Léa, la veille. Heureusement, elle avait le sommeil lourd donc aucun risque de la déranger. Elle me demandait néanmoins de la réveiller à 7h30 pour qu’elle puisse assister au cours de danse classique à 8h. En attendant, je pris ma douche, m’habillai et préparai mon sac. Je pris mon téléphone pour la première fois depuis mon réveil, je voulais donner des nouvelles à mes parents. Je ne les avais pas contactés depuis mon message annonçant notre arrivée. Je leur envoyai un petit message pour les rassurer et leur dire que j’avais un cours de musique et un cours de chant de prévu en plus des visites du jour, je leur promis de leur envoyer une photo en fin de journée. A ce moment, je me rendis compte que j’avais reçu quelques messages. Baptiste me souhaitait une bonne nuit et m’envoyait une photo d’eux au bar. Il y avait Yohan, Lorie, Audrey, Stéphane et même Alexandre. Ils avaient pris un verre tous ensemble et avaient un peu fait la fête. La photo était prise à une heure du matin. J’espère qu’ils n’ont pas oublié d’envoyer leur choix et qu’ils pourront se lever pour la grosse journée que l’on va avoir. Un autre message signé Yohan, il a dû prendre mon numéro à Baptiste, c’est le seul du groupe qui l’avait. « C’était une chouette journée. Bonne nuit, Célia. Je voulais juste te proposer d’aller prendre le petit déjeuner ensemble vers 7 heures. Lorie aime bien aller en cours de danse l’estomac vide. Et on pourrait en profiter pour passer un peu de temps ensemble. Promis, je ferai tout pour ne pas te mettre mal à l’aise. Cette phrase a dû avoir l’effet inverse. Bref, je serai un ange. Douce nuit. Yohan. » Son message me faisait sourire. Il était vraiment adorable. Je me disais que je pouvais peut-être lui laisser sa chance. Je pouvais accepter sa camaraderie. Je ne devais pas rebuter tout le monde. Il essaie, et ça me touche. Je mis mes écouteurs et me passai la ballade de John Legend de la veille. Je voulais repenser à ce moment précis où sans réflexion aucune, je me suis laissée allée. Ce moment où ma timidité a été mise de côté et j’ai chanté, probablement en pensant que personne ne m’entendrait mais j’avais chanté. Une des visites du jour allait me réserver un lot d’émotions aussi important, si ce n’est plus. Las Ramblas. Mes parents y avaient déjà été et je sais que je vais aller de spectacle en spectacle. J’avais hâte et peur à la fois. Mais je pense que mon excitation dépassait de loin mes craintes. De ballade en ballade, je refermais les yeux sur ce balcon laissant la brise caresser mon visage. Cet air frais semblait me rassurer, me réconforter. Je devais me laisser chanter. Ces notes que j’écoutais avec attention virevoltaient autour de moi et je les suivais des yeux. Puis le mouvement de ma tête imita leur danse et j’étais porté par une nouvelle chanson d’amour, une nouvelle émotion. Il était presque 7 heures, et je me décidai à répondre à Yohan, lui proposant de nous rejoindre devant la porte de ma chambre. Nul besoin de toquer, Léa dormait encore. Elle ronflait. Elle était tellement mignonne. Apparemment, Brenda était pour elle un exemple. Elle avait hâte de suivre ce premier cours avec elle. Hier, alors qu’elle préparait sa tenue, elle était excitée comme un enfant devant son premier jouet. De mon côté, je m’étais laissée tenter par le cours de musique. Ce matin-là, c’était un cours de mise en bouche. Nous allions apprendre à nous connaître et nous jeter à l’eau. Montrer notre niveau, les axes que nous cherchions à améliorer et voir ce que Julio avait à nous proposer. Cela faisait plus de six ans que je n’avais pas exhibé ma musique devant un public. Je n’avais pas pris ma guitare, elle aurait pris trop de place. Mais ma mère avait rangé mon ukulélé dans ma valise. Et puis, ils ont dû prévoir un piano aussi. Trêve de rêverie. Mon téléphone vibrait. Yohan m’attendait. Je le rejoins. Ce matin-là, il était en chemise grise à manches courtes et en short bleu. Très décontracté. Je m'étais aussi mise en chemise. Bleue à carreaux blancs, avec un pantalon blanc. Probablement pas ma meilleure idée, vue mon étourderie. Mais je me laissais le bénéfice du doute. Nous descendions au rez-de-chaussée, choisissions une table puis parcourions le buffet en quête de délicieuses offrandes. Quelques mini-pains aux raisins pour ma part, un jus d’orange et un œuf au plat. En rejoignant la table, je vis que Yohan avait également dévalisé le tas de viennoiseries. - Une autre fan de pains aux raisins ? - Coupable. Ce sont mes viennoiseries préférées. Ils sont tellement sous-cotés. - Totalement. Nous en rigolions et profitions du repas pour nous connaitre mieux. Il essayait de me poser des questions et tant que je ne jugeais pas les interrogations trop intrusives, je répondais. Puis il me racontait sa première année de prépa littéraire. Il était vraiment amoureux de ce qu’il faisait. A 7h30, je m’excusai pour aller réveiller Léa puis redescendre. Il fit une moue triste quand je partais et je me surpris à lui tirer la langue. Apprendre à connaitre une personne nous faisait prendre nos aises en sa compagnie. Je me rendais compte que de mon côté, je lui livrais uniquement des faits anodins sur ma vie, comme si je lui exposai mon CV pendant qu’il me livrait ses rêves, ses ambitions, sa vision des choses. J’étais répugnée par ce mensonge. Et pourtant, je ne mentais point. Mon hypocrisie m’horripilait. Mais je ne jouais pas la comédie. Je manquai juste de sincérité et la peur de l’attachement me contraignait à garder mes distances. Je lui avais livré plus de choses à mon sujet qu’à Baptiste. Et pourtant il me faisait plus peur que Baptiste. Peut-être parce que je me disais que ce dernier savait à quoi s’en tenir avec moi mais que Yohan allait fuir s’il en apprenait plus. Une fois, le repas fini, il m’accompagna jusqu’au hall de l’hôtel. Une voiture venait nous chercher pour nous emmener au conservatoire où allait se passer notre cours de musique. Yohan avait un cours d’écriture créative dans une salle de séminaire à l’hôtel. Je rejoins Julio et les quatre autres inscrits au même cours et nous voilà, partis.
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